
Du
Mardi 31 janvier, 20h
Auditorium Olivier Messiaen
14 €, 10 €, 5 €
Musique ancienne
Londres
Cordélia BÉRIDOT, Tiana Sena SAVI, Raphaël SHYRIKIAN, Lila TAYEB CHERIF, Mehdi BEKKAOUI, Angélique DESPREZ, Michel GARCIA, flûtes à bec
Anibal SIERRA, flûte traversière baroque
Jérôme HANTAI, Marie PLA-PIROVANO, Arnaud SERVIGNAT, Laurent GARDEUX, violes de gambe
Jesús NOGUERA GUILLÉN, Sylvain BRY et Jean-Baptiste COSTA ROBERT, clavecin
Le temps d’une soirée, les professeurs et élèves du département Musique Ancienne vous feront découvrir l’intense activité musicale dans les salons et les scènes de la ville de Londres, entre la fin du XVIème, marquée par un style national singulier et le XVIIIème siècles, résolument cosmopolite.
Lorsqu’un homme est fatigué de Londres, c’est qu’il est fatigué de vivre, car à Londres, on trouvé tout ce qui la vie peut offrir Samuel Johnson (1709-1784)
On dit souvent que celui qui a vu New York ou Londres a vu le monde. Cosmopolites et dynamiques ces villes ont attiré tout au long de leur histoire les artistes les plus remarquables et singuliers. Instrumentistes, chanteurs et danseurs du monde entier ont su profiter de l’appétit musical pantagruélique des Londoniens et de la capacité entrepreneuriale hors pair des agents, attachés de presse et managers des orchestres capables de transformer les musiciens de cette ville en véritables businessmen. Hautement appréciée par toutes les couches sociales, la musique semble être une valeur culturelle commune à tous les Britanniques. Que vous soyez un sujet de sa Gracieuse Majesté ou un ressortissant étranger à la recherche d’un avenir meilleur, que vous apparteniez aux couches les plus défavorisées, à la dynamique classe moyenne ou à l’impitoyable monde des affaires, que vous soyez issu de la vielle aristocratie ou d’une lignée d’ouvriers ou miniers vous pouvez croquer la vie musicale londonienne avec gourmandise.
Si vous avez la chance de passer une semaine dans cette ville et vous souhaitez aller au concert vous n’aurez que l’embarras du choix, tellement l’offre musicale semble infinie. Vous pourrez y entendre les plus grands instrumentistes et chanteurs du monde se produire en récital ou en soliste avec les formidables orchestres symphoniques et les superbes ensembles spécialisés dans la musique ancienne. Si par hasard vous êtes dans la capitale du royaume mi-septembre, vous pourrez assister à The last night des célèbres Prom’s. Pendant la deuxième partie de cette soirée, qui clôt huit semaines riches de quelques soixante-dix événements musicaux d’une très haute qualité et d’une époustouflante diversité, vous découvrirez que le public du Royal Albert Hall (composé de quelques cinq mille personnes) se joint à l’orchestre de la BBC pour chanter parfaitement en mesure le célèbre thème de Pomp and Circumstance de Sir Edward Elgar (1857-1934). Vous serez encore surpris d’assister au spectacle parfois loufoque parfois provocateur généré par l’apparition sur la scène d’un célèbre et charismatique chanteur habillé pour l’occasion en Amiral Nelson ou en Père fondateur de l’Amérique, en walkyrie ou en inca, en défenseur de la cause irlandaise ou en égérie des droits LGBT et d’entendre le public en délire entonner (devrais-je dire beugler ?) avec une ferveur patriotique le non moins célèbre Rule Britannia de Thomas Arne (1710-1779), souvenir d’un passé colonial aujourd’hui révolu !
Peut-être seriez-vous choqués par tant d’exubérance et d’enthousiasme, habitués comme nous sommes en France à l’ambiance feutrée et bien rangée de nos concerts ? Détrompez-vous : le public londonien est le plus ancien et le plus respectueux du monde. La curiosité et l’ouverture d’esprit font partie de leur ADN depuis le XVIIe siècle.
Saviez-vous qu’en 1672 le violoniste et compositeur John Banister, après avoir quitté son poste à la Chapelle Royale, a ouvert une salle de concert (« un vilain trou, empli de tables et de chaises, avec un box garni de rideaux pour les musiciens ») et a proposé aux Londoniens les premiers concerts publics de l’histoire de la musique ? Pour la modique somme d’un shilling on pouvait y écouter de la musique « donnée par d’excellents maîtres. » Une annonce publicitaire parue dans un journal indiquait que chaque séance « commencera à quatre heures précises de relevée (!) et il en sera ainsi chaque après-midi par la suite ». A sa mort, en 1679, Thomas Britton, marchand de charbon, ouvrira une nouvelle salle de concert dans l’étable transformée en entrepôt où il tenait commerce. Ses concerts, qui se poursuivront avec succès pendant quarante ans, avaient lieu chaque mardi. Un abonnement annuel coûtait dix shillings et pour la très modeste somme d’un penny le public pouvait s’offrir une tasse de café. Un jeune et ambitieux compositeur saxon du nom de Georg-Friedrich Haendel fera ses débuts londoniens dans cette modeste salle « avec une fenêtre à peine plus grande que la bonde d’une barrique (…) par laquelle tous ceux prêts à se tordre le cou pouvaient jouir du plaisir d’entendre de nombreux et remarquables concerts ». Doué en affaires autant qu’en musique, Haendel deviendra le centre de la vie musicale Londonienne, sera sponsorisé par l’aristocratie britannique, obtiendra le soutien inconditionnel du roi George II et stimulera la fidélité de son public s’entourant des meilleurs chanteurs et instrumentistes de son temps. Quand le vent changera, qu’il fera faillite et que ses opéras ne seront plus du goût du public il trouvera un nouveau produit à mettre sur le marché, cherchera des nouveaux sponsors dans une autre couche de la société, des nouveaux soutiens parmi les puissants et réussira à fidéliser un nouveau public, même après sa mort. En 1885, pour célébrer le bicentenaire de sa naissance 4 500 musiciens et chanteurs ont joué avec ferveur son Messie au Chrystal Palace pour un public composé de 88 000 auditeurs. Quel succès pour cette entreprise culturelle Britannique qui avait débuté son activité commerciale en 1712 !
Mais ne croyez pas que tout est clinquant et démesuré sur la scène musicale londonienne. Car le public londonien sait reconnaître la qualité des œuvres musicales et des artistes musiciens. Il sait aussi apprécier la profondeur du message spirituel qui se dégage du discours musical et sait montrer sa plus sincère gratitude vis-à-vis de certains artistes qui les accompagnés.
Comment ne pas être aussi émus par ce public Londonien qui privé de concerts pendant la Deuxième Guerre Mondiale retrouvait l’espoir en écoutant religieusement Dame Myra Hess jouer du piano sur les ondes de la BBC. Galvanisés par la beauté et l’humanité de la musique de Bach et Beethoven ils arrivaient à oublier la violence destructrice des bombardements allemands, les souffrances et les privations de la vie quotidienne. Courageuse et efficacement reconstruite pendant les années 50 la ville de Londres a abrité des orchestres qui comptaient parmi les meilleurs du monde. C’est ici que Furtwaëngler, Klemperer, Beecham et Barbirolli ont enregistré leurs meilleurs disques. Pendant les années 60, les années du swinging London, des Beatles et de Chapeau melon et bottes en cuir, la puissance de l’industrie discographique classique anglaise et la position géographique centrale de la ville au sein d’un réseau aérien en pleine expansion ont attiré innombrables et talentueux jeunes artistes venus des quatre coins du monde lancer ou asseoir leurs brillantes carrières musicales.
A la fin des années 70, marchant sur les pas du célèbre contre-ténor Alfred Deller, la soprano Emma Kirby, le flûtiste Stephen Preston et le violoniste Simon Standage ont participé à la naissance d’inoubliables ensembles jouant le répertoire ancien « sur des instruments d’époque ». Sous la direction de Christopher Hogwood, Trevor Pinnock, Roger Norrington et John Elliot Gardiner, l’Academy of Ancien Music, The English Concert, les London Classical Players, les English Baroque Soloists et l’Orchestra of the Age of Enlightenment ont réalisé un formidable travail de redécouverte et de remise en valeur d’oeuvres oubliées ou malmenées par une lecture et un jeu instrumental hérités du XIXe siècle.
C’est dans cet esprit que le Département de Musique Ancienne du conservatoire de Cergy-Pontoise vous propose ce soir de traverser la Manche et de vous arrêter sur les bords de la Tamise le temps d’un concert pour découvrir l’intense vie musicale de la ville de Londres entre le XVIe et le XVIIIe siècles. Nous traverserons ces trois siècles au son de la musique des virginalistes et des joueurs de violes qui ont forgé un style anglais intime et singulier, des joueurs de flûtes à bec et des traversistes qui ont apporté en Angleterre l’art de la danse et de l’orchestre des français et le bel canto des italiens. Nous découvrirons ensemble comment dans cette ville monde la musique a été capable d’accompagner l’évolution de la situation politique et religieuse de ce pays, de subir l’influence d’un marché et d’incarner un cosmopolitisme qui sut attirer sur les bords de la Tamise tout ce qui dans le monde pouvait représenter une valeur culturelle et commerciale capable de transformer la capitale musicale d’un royaume insulaire et périphérique en puissance culturelle, économique et coloniale.
Programme
Antonio de Cabezón, vers 1510-1566
William Byrd, vers 1540-1623
Deux versets sur Christe qui lux
Osbert Parsley, 1510-1585
In nomine à 4
William Byrd, vers 1540-1623
Tobias Hume, vers 1570-1645
The earle of Montgomerie’s delight
Henry Purcell, 1659-1695
Two in one upon a ground
Three parts upon a ground
Georg-Friedrich Haendel, 1685-1759
Sonate en sol majeur, HWV 363b
Adagio - Allegro
Adagio - Bourrée Anglaise
Minuetto
François (Charles) Dieupart, 1676-1751
2ème Suitte en ré majeur
Ouverture, Gravement, Viste
Allemande
Gavotte
Passepied
Gigue
Johann-Christoph Pepusch, 1667-1752
Beggar's opera, Ouverture
Francesco-Saverio Geminiani, 1687-1762
Trois airs, tirés de A treatise of good taste in the art of musick
Auld Bob Morrice, Affetuoso-Allegro
Lady Ann Bothnel’s Lament, Affetuoso-Allegro
Sleepy Body, Allegro moderato
Anonyme
Óró’ Mhór A Mhóirín & The Gorum 1 et 2
Conservatoire à rayonnement régional de Cergy-Pontoise
95000 Cergy Grand Centre
Tél : 01 34 41 42 53